Quels sont les aspects des programmes de lutte contre les maladies infectieuses qu'il est utile d'explorer qualitativement?

Les méthodes qualitatives génèrent des données non numériques riches et sont bien adaptées pour comprendre les questions "comment, quoi et pourquoi" ou les sujets que nous connaissons très peu. Les méthodes qualitatives permettent également aux chercheurs ou aux responsables de la mise en œuvre des programmes de comprendre les problèmes du point de vue et dans la langue des membres de la communauté et des informateurs clés. Les méthodes qualitatives peuvent être utilisées seules ou combinées à des mesures quantitatives pour une meilleure compréhension de la ou des questions de recherche.

Pendant une épidémie, il est particulièrement important d'écouter les communautés et d'utiliser activement leurs commentaires pour procéder à des ajustements programmatiques, ainsi que de faire entendre leur voix et leurs opinions aux personnes prenant les décisions, car ils n'ont pas toujours la possibilité de le faire directement. Les données qualitatives peuvent générer des informations narratives importantes sur les besoins actuels, les craintes et les perceptions de votre maladie focale.

La recherche qualitative peut être utile au cours des étapes suivantes de la mise en œuvre du programme:

Recherche formative sur le comportement - La recherche formative est effectuée avant la conception du programme et aide à "former" les programmes, en veillant à ce qu'ils soient adaptés au contexte et qu'ils répondent efficacement aux besoins et priorités particuliers de la population locale. La recherche formative utilise normalement une série de méthodes - qualitatives et quantitatives - pour comprendre les pratiques actuelles, les perceptions et les déterminants du comportement (c'est-à-dire les facteurs qui permettent ou empêchent un comportement). Elle est souvent répétée au cours du processus d'intervention pour permettre l'adaptation et l'apprentissage. La recherche formative visant à informer les activités de prévention des maladies implique de sélectionner des méthodes pour répondre aux types de questions suivants:

Pré-tester les idées d'intervention - Avant de déployer un programme à grande échelle, il peut être utile de le tester auprès d'un petit groupe de personnes. Pour ce faire, des méthodes qualitatives peuvent être utilisées pour déterminer la faisabilité et l'acceptabilité des comportements proposés et des composantes de l'intervention. Les méthodes qualitatives peuvent être développées pour explorer les types de questions suivants:

Contrôle de l'acceptabilité et de la responsabilité - Tout au long de la mise en œuvre du programme, il doit y avoir des moyens de continuer à tirer des enseignements des populations. Il s'agit notamment de sélectionner des méthodes permettant de répondre aux types de questions suivants:

Évaluations de processus - Les méthodes qualitatives peuvent également être utilisées pour étudier la manière dont le changement s'est produit ou non au niveau individuel ou communautaire. Il s'agit notamment de sélectionner des méthodes permettant de répondre aux types de questions suivants:

Faisabilité de la mise en œuvre -

Les méthodes qualitatives peuvent également être utilisées avec les équipes de mise en œuvre pour planifier ou évaluer la faisabilité et les aspects logistiques de la mise en œuvre du programme. Il s'agit notamment de mettre au point des méthodes pour répondre aux types de questions suivants:

En fonction du risque de santé publique qui vous préoccupe, les méthodes qui évitent les interactions en face à face avec les participants peuvent être essentielles pour minimiser la transmission. C'est pourquoi de nombreux instituts de recherche considèrent que la collecte de données en face à face est contraire à l'éthique pendant les épidémies de certaines maladies et suggèrent de minimiser les interactions directes lorsqu'il n'y a pas d'urgence. Nous décrivons ci-dessous plusieurs méthodes possibles pour la collecte de données qualitatives à distance :

Bien que de nombreux exemples et ressources de cette section concernent le COVID-19, les principes et les activités peuvent être appliqués à la programmation pour d'autres maladies infectieuses.

Cette section a été rédigée en pensant à la COVID-19; elle se concentre donc sur les comportements préventifs clés de COVID-19. Toutefois, les principes et les pratiques peuvent être appliqués à des maladies dont les comportements préventifs sont similaires, ou adaptés à des comportements différents.

Les mesures quantitatives génèrent des résultats qui peuvent être résumés sous forme numérique, comme le nombre de personnes qui ont une opinion particulière ou qui adoptent un certain comportement. Les mesures quantitatives sont utiles parce qu'elles sont relativement faciles à collecter (la même question est posée à tous les participants) et parce qu'elles peuvent aider à suivre l'évolution des opinions ou des comportements dans le temps (par exemple, avant la mise en œuvre d'un programme, à la fin de la mise en œuvre du programme et parfois à des intervalles intermédiaires).

Lors du choix d'une méthode de collecte de données, il est important d'être conscient des biais potentiels. Ceci est particulièrement important lorsqu'il s'agit de mesurer un comportement. Une série de biais peut être introduite, en particulier si le participant est conscient du comportement observé. Les biais dans les mesures du lavage des mains sont souvent liés au biais de désirabilité sociale (le désir de donner une réponse qui répondra aux attentes sociales), en raison de la connaissance commune des avantages perçus du lavage des mains, par exemple. Les mesures du lavage des mains sont également souvent affectées par un biais de mémorisation (l'incapacité des participants à se souvenir avec précision de leur comportement passé), car il peut être difficile de se souvenir de la fréquence d'un comportement quotidien routinier ou habituel.

S'il existe une abondante littérature sur la mesure du comportement en matière de lavage des mains, il y en a moins sur l'utilisation des masques et la distance physique. Cependant, bon nombre des difficultés liées à l'évaluation du lavage des mains sont également susceptibles d'affecter l'utilisation des masques et la distance physique, étant donné qu'à la suite de la pandémie de COVID-19, ces pratiques sont aujourd'hui largement et publiquement encouragées. Ils sont donc souvent considérés comme socialement souhaitables.

Nous présentons ci-dessous plusieurs indicateurs quantitatifs permettant de mesurer le comportement en matière de lavage des mains, ainsi que leurs points forts et leurs limites. Nous incluons également des exemples comparables pour l'utilisation de masques et la distance physique. Pour plus d'informations sur la mesure du comportement, voir cet article. Ce guide présente également un résumé de certains des problèmes posés par les mesures courantes du lavage des mains.

Pour des exemples de certaines des mesures ci-dessus appliquées dans des études de recherche, voir les liens suivants pour chaque type d'indicateur: intentions comportementales, fréquence du comportement autodéclaré, comportement autodéclaré par occasion, rappel caché, existence d'un endroit pour se laver les mains.

Pour l'utilisation des masques, des questions similaires peuvent être posées sur l'intention de porter un masque, la régularité de l'utilisation du masque (toujours / parfois / rarement / jamais), le rappel caché ou le fait d'avoir un masque à la maison. Lors de l'épidémie de SRAS en 2003 et de la pandémie de COVID-19, des enquêtes téléphoniques ont été utilisées pour suivre les changements de comportement de la population et les sentiments à l'égard des mesures de santé publique à Hong Kong. En ce qui concerne la distance physique, les intentions et les comportements autodéclarés sont également possibles. Par exemple, vous pouvez mener une enquête sur la "mixité sociale", qui recense le nombre de personnes avec lesquelles le participant a été en contact au cours de la semaine écoulée. Ces informations peuvent être ventilées selon qu'il s'agit de personnes à l'intérieur ou à l'extérieur de leur foyer, et selon l'âge, le sexe et la proximité physique (par exemple, au-delà d'un mètre/à moins d'un mètre (ou la distance physique recommandée dans les lignes directrices nationales), ou sans contact physique/avec contact physique tel qu'une poignée de main ou une accolade). Bien que ces méthodes de compréhension de l'utilisation du masque et de la distance physique soient plus récentes, il a été prouvé que le comportement de distance physique auto-déclaré corresponde assez bien au comportement réel. Depuis le début de la pandémie de COVID-19, plusieurs études d'intervention clés portant sur l'utilisation du masque ont été publiées (étude 1, étude 2, étude 3). Dans ces études, l'utilisation effective du masque a été mesurée par l'observation directe au sein de la communauté et par la fréquence du comportement autodéclaré.

Dans la mesure du possible, il est utile de combiner des mesures quantitatives avec des mesures qualitatives.

Il existe plusieurs façons de collecter des données quantitatives à distance. Il peut s'agir d'enquêtes par téléphone (également appelées CATI - Computer Assisted Telephone Interview), de textes/ SMS, d'applications, de réponses vocales interactives (IVR) ou d'enquêtes en ligne. Des descriptions détaillées de ces méthodes sont fournies dans le présent rapport.

Qu'il s'agisse d'abandonner la collecte de données en face à face ou de concevoir spécifiquement un outil de collecte de données à distance, la collecte de données à distance nécessite certaines considérations spécifiques, comme indiqué ci-dessous.

Pour la collecte de données par téléphone, il est important que la durée de l'entretien/enquête soit courte pour un certain nombre de raisons (notamment l'utilisation du temps précieux du téléphone, l'utilisation de la batterie, la perte d'intérêt de la part des répondants). Vous pouvez envisager de diviser un entretien en plusieurs appels téléphoniques si nécessaire. De plus amples informations sur les durées recommandées pour les entretiens/enquêtes via différents modes de collecte de données sont incluses dans ce rapport. Pour limiter la durée des entretiens ou des enquêtes, il peut être nécessaire de procéder à plusieurs séries de tests et de réviser les questions. Vous devrez également déterminer quelles sont les questions les plus importantes et vous assurer qu'elles figurent au début de l'enquête, là où elles ont le plus de chances d'être répondues.

Lors de la collecte de données par téléphone, il est important de réfléchir à la manière d'informer les participants des activités de collecte de données et de leur demander leur consentement avant de procéder à la collecte. Il est également important de veiller à ce que la collecte des données se fasse dans le respect de l'éthique, en particulier pendant les épidémies, lorsque les personnes peuvent être plus vulnérables à la discrimination et à l'exclusion. Pour obtenir des conseils sur la manière de procéder, consultez notre ressource sur l'éthique, le consentement, la protection et le risque ici ou consultez ce rapport ALNAP.

Si vous souhaitez enregistrer un entretien qualitatif, vous devez obtenir le consentement de la personne concernée. Les appareils d'enregistrement ne doivent pas être allumés avant le début de l'entretien ou du groupe de discussion et doivent être immédiatement éteints une fois l'entretien ou le groupe de discussion terminé. Il existe des applications qui permettent d'enregistrer les conversations téléphoniques ou bien un enregistreur peut être placé à côté du téléphone pendant qu'il est utilisé en mode haut-parleur. Prendre des notes sur un ordinateur ou avec un stylo et du papier peut être une solution de secours, ou si le participant ne consent pas à ce que l'entretien soit enregistré. Cependant, prendre des notes tout en menant des entretiens approfondis est difficile et risque de compromettre la qualité de la conversation ou la précision de la documentation de ce qui est dit ; il est donc recommandé de faire appel à une personne supplémentaire pour prendre des notes. Certaines applications produisent des transcriptions de conversations verbales.

Pour les entretiens quantitatifs, réfléchissez à la manière dont les données peuvent être enregistrées afin d'en garantir la qualité. Il peut être judicieux d'inclure autant d'options de réponse que possible dans les formulaires d'enquête afin d'éviter que les personnes chargées de la collecte des données n'aient à taper de longues notes. Il est probablement plus efficace pour les collecteurs de données de collecter les données sur un ordinateur ou une tablette, qui peuvent ensuite être envoyées directement à un serveur en ligne, mais cela n'est pas toujours possible dans les contextes où les ressources sont limitées. Si les données sont collectées sur papier, il convient de réfléchir à la manière dont elles seront saisies ultérieurement sur un ordinateur et à ce qu'il adviendra des copies papier (elles devront être sécurisées ou détruites après utilisation).

Veillez à ce que le personnel chargé de la collecte des données puisse mener l'entretien dans une pièce calme de son bureau ou de son domicile, afin d'éviter toute perturbation pendant l'entretien et de préserver la vie privée. Réfléchissez à la manière dont les données seront stockées et à la manière dont vous garantirez leur sécurité. Les téléphones, tablettes et/ou ordinateurs utilisés pour collecter les données doivent être protégés par un mot de passe. Réfléchissez à la manière dont vous préserverez la confidentialité et l'anonymat de vos participants si vous devez partager les résultats de la recherche. Si vous utilisez des plateformes technologiques, assurez-vous de vérifier les mesures de sécurité en place.

Réfléchissez à la possibilité d'offrir aux participants une compensation pour le temps qu'ils y consacrent. Cela est particulièrement nécessaire si l'entretien se déroule par le biais de technologies qui pourraient leur coûter de l'argent. Par exemple, une compensation peut être nécessaire pour couvrir les coûts de recharge des téléphones, l'achat de crédit téléphonique ou de données et d'autres coûts d'opportunité. Cette compensation peut se faire de différentes manières. Il peut s'agir, par exemple, d'envoyer du crédit téléphonique ou de l'argent par l'intermédiaire de plateformes bancaires mobiles, telles que M-pesa et Paytm.

Dans certains cas, la collecte de données qualitatives à distance a permis aux participants de s'exprimer plus librement, par exemple sur le travail des organisations d'aide internationale. Cela peut s'expliquer par le fait que la relation personnelle entre l'enquêteur et le participant est moins forte. Il est également possible que cette distance entre l'enquêteur et le répondant réduise d'autres types de biais courants. Par exemple, les participants peuvent se sentir plus "anonymes" et donc plus à même de rendre compte avec précision des comportements socialement souhaitables. Toutefois, de nouveaux biais peuvent également être introduits lors de la collecte de données à distance. Par exemple, il peut être plus difficile de retenir l'attention du participant par téléphone ou par d'autres moyens de collecte de données à distance. Pour minimiser les erreurs de déclaration, il peut être utile de diversifier la façon dont vous posez les questions. Des exemples de questions visant à minimiser les biais de déclaration ou les réponses neutres sont décrits dans ce blog, ainsi que des informations sur d'autres biais.

De nombreux collecteurs de données n'auront que peu ou pas d'expérience de la collecte de données à distance. Il sera donc très important de fournir une formation approfondie sur ce nouveau mode de collecte de données. Ces deux blogs contiennent des conseils utiles sur le recrutement et la formation des collecteurs de données et sur la garantie d'une qualité élevée des données. Au cours de la formation, prévoyez des scénarios dans lesquels les personnes interrogées demandent plus d'informations sur la maladie principale, signalent des pratiques dangereuses ou déclarent être victimes d'abus, et apprenez aux collecteurs de données comment ils doivent répondre et quelles actions ils doivent entreprendre. Vous trouverez des conseils à ce sujet dans le présent rapport.

Réfléchissez au matériel dont vos collecteurs de données auront besoin, et notamment s'ils auront besoin d'un numéro de téléphone portable différent dédié à cette activité de collecte de données. Vous devrez réfléchir à la manière dont vous conserverez la trace des données collectées et aux mécanismes de communication que vous mettrez en place pour contrôler régulièrement vos équipes de collecte de données. Des protocoles détaillés doivent être rédigés sur la manière de mener l'activité de collecte de données, du début à la fin.

Rédigé par : Fiona Majorin, Astrid Hasund Thorseth, Sian White et James B. Tidwell
Vérifié par : Julia Rosenbaum, Kondwani Chidziwisano, Sheillah Simiyu, Katrina Charles, Li Ann Ong, Rob Hope
Article mis à jour le : 01.03.2023